C’est alors, l’esprit vide et l’amertume collée au palais, qu’elle m’a appelé. Elle. La Grande. Je brassais une dernière fois le paquet de cartes puis le rangea, mon ombre me dépouillait de toute façon. Je fourrais le même vieux livre dans ma poche, me versais une grande tasse de thé encore bouillante, et sorti sans un regard en arrière. Trop longtemps que ces murs me retiennent prisonnier, et que de trop vives lumières m’éblouissent.
Je sortis donc, le mégot collé aux lèvres, et longeant d’aléatoires allées je me perdis bien vite dans l’infini dédale qui s’offrait à moi, sans lune pour me guider. Le froid, carnassier, picorait et se régalait de chaque parcelle de ma peau, tandis que des brasiers liquides et vaporeux s’infiltraient en mon corps. Le vagabondage nocturne idéal. C’est une ruelle déserte et son unique lampion qui attira mon attention, et je pus m’asseoir sous son couvert pour y puiser la sagesse de quelques pages encore trop peu abrasée. Les rares passants continuent leur route sans faire attention au Nightcrawer. De toute façon, ils n’existent plus désormais, il ne reste plus que le thé fumant qui lentement s’écoule, la faible lumière du lampadaire solitaire, la noirceur du ciel et les mots qui un à un s’encrent en mon esprit.
C’est la chair dévorée par le froid que je finis par me relever, et lentement pris une route qui me mènerait irrémédiablement dans mon antre, la tasse vide mais la tête remplie de nouveaux songes, s’entrechoquants, s’embrasants, s’envolants, sans rencontrer quelconque limite. Les idées, reflexions, souvenirs et autres vacarmes mentaux ne forment ainsi qu’une seule et même unité disparate, s’animant en une merveilleuse et chaotique symphonie.
A peine fus-je rentré que je rempli de nouveau mon godet, celui-là même qui m’a suivi lors de mes pérégrinations. Ainsi est-il aussi plein et fumant que ma cervelle.
Il est à présent 01:03, et mon seul souhait est que vous puissiez goûter aux flux qui me traversent, vivre et ressentir les rêveries éphémères qui à la fois chacune leur tours et toutes ensembles naissent et meurent ma coquille de tête. Mais je ne peux vous y forcer, et mes mots sont bien pauvres face à tout cela. Tout ce que je peux faire pour l’instant est de vous souhaiter, même si vous n’y êtes pas étrangers, le bonjour à tous.